PRIX AUDIBERTI Sylvain Tesson : Le Païen errant du monde Grec…

C’est dans le cadre enchanteur de la Villa Eileen Roc que le Prix Audiberti est remis chaque année à un auteur qui, par son œuvre, a marqué son époque. Cette année, le lauréat a été Sylvain Tesson.

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Comme à son habitude, c’est le maire d’Antibes, Jean Leonetti, qui a ouvert le bal des remerciements estimant « que l’on oublie trop souvent le siècle de la sagesse de la Grèce antique »… Et d’ajouter « que les écrits d’Homère, sous la plume de Sylvain Tesson en ressortent transfigurés, transmués, et tout simplement meilleurs ».

« Les Grecs savaient regarder le monde »
Le président du Jury, l’écrivain et réalisateur, Didier Van Cauwelaert a salué un auteur « qui fait émerger une œuvre avec ses voyages ». Pour lui, Sylvain Tesson « est au plus près de ce qu’il veut exprimer » reprenant une citation d’Antoine Blondin. Et d’ajouter : « Son écriture est une expression du corps, sa langue est charnelle, sensuelle, physique… Plus on parle de lui, plus il donne de la vitamine à nos vies ». Dans ces conditions, lorsque Marie-Lise Audiberti a susurré le nom de Sylvain Tesson, le président Van Cauwelaert n’a pu qu’abonder dans ce sens, lui qui lui avait déjà remis un Prix Baie des Anges à Nice. Outre son dernier magnifique livre, « Un été avec Homère », Didier a cité « L’énergie vagabonde » qui reflète bien « l’élégance, la folie, l’enthousiasme d’un auteur qui est avant tout un honnête homme ». Ce en quoi il rejoint la conclusion d’ « Un été avec Homère » où le porcher final serait « un homme divin »… Pour lui, « Les Grecs savaient regarder le monde »…

« Homère aurait mérité le Prix Audiberti ! »
Sylvain Tesson a vécu un rêve éveillé : « Si on m’avait dit un jour que je reviendrai à Antibes où je me suis baigné à la Salice, à la Garoupe, pour entendre de telles paroles de Didier Van Cauwelaert, je ne l’aurai pas cru ». Après de longs mois passés dans l’œuvre d’Homère, Sylvain Tesson voit dans les mythes grecs, un monde d’imagination, de fantaisie, de mystère où les manifestations du vivant sont magnifiés… et si un homme a su les empoigner, c’est bien Audiberti. C’était un Grec à sa manière par son amour de la vie, de la chair, de la sensualité. Il y a quelque chose de Païen dans l’œuvre d’Audiberti ». Il voudrait inscrire au fronton des Temples, l’une de ses maximes : « Je ne veux pas choisir entre la loi de la panthère et le devoir du pardon ». Et d’ajouter, un mot de Nerval : « Le plaisir est le Dieu du monde ». Pour Sylvain Tesson, entre Audiberti et Homère, il y a le même sens de la gaieté, de la joie, de l’humour… « C’est la nature, l’effort dans la nature, le contact avec les éléments qui peuvent nous libérer de nos tourments… Il faut aller chercher cette énergie vagabonde sur les mers, dans les forêts, sur les sommets… Les choses arrivent quand on les nomme ». S’il y a un auteur qui aurait mérité le Prix Audiberti, c’est bien Homère !

Son animal totem : « Le Poulpe »…
Répondant aux questions, à propos de son animal totem, il a choisi le poulpe : « Il est à l’image de l’auteur, il disparaît dans un grand nuage d’encre…, à reculons… ». Sur les convulsions du monde entre les trois religions du Livre, il regrette qu’elles s’affermissent « d’un point de vue plus profond, personnel, sensible car toute idée de révélation vers une vie éternelle nous éloigne d’une morale païenne… De cette pensée de Priam devant le soleil sur les remparts de Troie : « Tout ce qui se dévoile est beau ». Je préférerai toujours la caresse du vent dans un pin maritime, la majesté d’une panthère des neiges au Tibet, le verger et les champs à la coupelle de fruits… ». A propos de ses voyages, il ne rapporte aucune photo : « En tant que pessimiste chronique, j’ai toujours peur d’avoir raté la bonne photo… Il y a eu un grand moment dans l’Art, la Grotte de Lascaux, et après, c’est de la décadence… ». Sylvain Tesson est une bouffée d’air frais, une envie de sommets, une volonté de liberté… de partir aussi avec lui sur une île des Cyclades et l’écouter des heures, nous raconter Ulysse et ses aventures qui ressemblent tant aux siennes…

Pascal Gaymard