Accueil À la Une LITTÉRATURE – Robert Maire : La Mémoire d’Antibes Juan-les-Pins

LITTÉRATURE – Robert Maire : La Mémoire d’Antibes Juan-les-Pins

À l’occasion de la sortie de son nouveau livre, Robert Maire a refait le film de sa vie pour notre grand plaisir.

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Pour cet ouvrage qui fera date, « Antibes, étape et escale du chemin de Compostelle – Histoire du Bastion Saint-Jaume », il a effectué un travail de recherche colossal qui en fait l’historien et la mémoire d’Antibes Juan-les-Pins.

Un enfant d’Antibes…

Robert Maire a connu plusieurs vies, un peu comme les chats. Il a été chanteur, écrivain, chauffeur de Prévert, acteur de cinéma… À son compte, une vingtaine d’ouvrages, tous sur Antibes, sa ville natale qu’il connaît par cœur. Le Fort Carré n’a plus de secret pour lui, Brusquets non plus qui serait l’un de ses lointains aïeuls, le vieil Antibes qu’il sillonne sans cesse… Bref, Robert Maire est une légende. Prochainement, la Médiathèque Albert Camus d’Antibes lui ouvrira sa salle d’exposition. Il est né en 1937, juste en face de la porte Marine et au-dessus du célèbre restaurant, « Chez Félix au Port ». Fils d’un militaire de carrière et d’une commerçante, il a grandi dans un milieu bourgeois. Pourtant, il est « un petit voyou » d’après ses propres aveux. Chef de bande du port, il se fritte assez souvent avec les bandes du Vieil-Antibes. Il est plus souvent dans la rue avec ses copains que sur les bancs de l’école. Il n’est assidu qu’en rédaction où ses écrits sont conservés. À 12 ans, lors des préparatifs de sa Communion qui mêle garçons et filles à la Cathédrale, il tombe raide dingue d’une jolie blonde, Mireille, pour qui il écrit ses premiers poèmes. Elle est aujourd’hui toujours sa femme. Pour elle, il tournera le dos à cette vie de patachon de chat de gouttière et de la rue.

La rencontre avec Prévert

Nous allons vous prouver qu’il a réellement eu plusieurs vies. À 14 ans, il s’inscrit au Conservatoire de Musique de la ville avec Clara Martinovitch et suit ses cours de diction et de guitare. C’est en 1952 qu’il chante pour la première fois en s’inspirant de Charles Trenet, des textes à l’eau de rose. Les temps sont difficiles… Il rédige son premier recueil de poésie en alexandrins, rimes, césures, quatrains… Il admire Verlaine. Un an plus tard, il fait la plus grande rencontre de sa vie, il devient l’ami, le chauffeur, le confident de Jacques Prévert. Ce dernier aime à venir faire le marché en famille à Antibes, abandonnant un instant son village perché de Saint-Paul de Vence. Bientôt, il sera Antibois grâce à Marcel Duhamel qui lui trouve un appartement donnant sur les remparts. Prévert ne conduisant pas, c’est à Robert qu’il incombe de le promener au volant de sa petite Austin-Morris Cooper country-man rouge avec ses boiseries. Mais il sera aussi son secrétaire, son complice, son confident. C’est ainsi qu’il rencontrera une quarantaine de fois Picasso, d’abord à Vallauris, puis à la villa « La Galloise », ensuite à Cannes au quartier de la Californie, et enfin à Mougins. Pablo l’appelait « Pekino », et il devient l’ami de célèbres photographes comme André Villers, Robert Doisneau, André Verdet… mais aussi de Mouloudji, Montand, Reggiani, Ventura, Dor de la Souchère, Boris Vian avec lequel il chantera, Le Déserteur, au club du Bateau de son ami Pierre Dudan.

Instit en Algérie…

Encouragé par Prévert, Robert écrit des chansons pour Lynette Giraud et Cora Vaucaire qui loge à Antibes. On l’appelait « la Dame Blanche », en opposition à Juliette Gréco, toujours en noir. Toujours grâce à son mentor, il fait les premières parties de Piaf au Vieux Colombier de Juan-les-Pins. Il passera à la Fête du Château de Nice, puis auprès de Francis Lemarque au Bois de Boulogne en 1956 pour la Fête de l’Huma soit un million de spectateurs. Entre-temps, de 1954 à 1956, il est journaliste free-lance (pigiste) à Marseille, au Provençal, le canard de Gaston Deferre. La Guerre d’Algérie le rattrape. Il rêve de rejoindre le Théâtre aux Armées mais l’amitié avec Prévert et une arrestation dans une boîte de nuit de Nice, le « Da Bouto » pour chants anarchistes. C’est ainsi qu’il se retrouve à la frontière Algéro-Tunisienne à la ligne Morice, soit le coin le plus sensible. En pleine zone interdite, il décide de créer une école dédiée à Jacques Prévert. Il en fera même la classe et passera une nouvelle fois à travers les gouttes, le Colonel Bigard étant toujours là pour le protéger. Le père de Robert avait fait la guerre avec lui… Cela crée des liens inamovibles. Plus tard, Mme Herraney, une institutrice prendra le relais. S’il a un regret, c’est de n’avoir pas réussi dans la chanson. Mais il y avait tant de génies à l’époque… En 1963, il se présentera à la Rose d’Or de Juan-les-Pins.

Peynet, Carné et Compostelle…

Son autre rencontre d’importance, ce sera Peynet pour lequel il ouvrira un musée. Il s’en occupera longtemps. Marcel Carné l’engage comme doublure de Gilbert Bécaud ce qui va lui permettre de donner un faux baiser à Françoise Arnoul… « Le Pays d’où je viens » sera un fiasco… Robert Maire est un réservé, il s’apprivoise. Parler de lui, il le peut… que s’il est en confiance. Il aime à citer Rudyard Kipling : « Faire la biographie de quelqu’un, c’est du cannibalisme ». Mais au final, pourquoi ce livre sur Saint-Jacques de Compostelle, le « Camino » qu’il a fait en trois fois. C’est en revenant de son dernier périple que la nécessité d’en faire un livre lui est venue. Les 35 euros qu’il coute sont intégralement versés aux œuvres sociales de la Ville d’Antibes. Son prochain ouvrage, ce sera sur Prévert… Il aura écrit 1000 chansons, réalisé 5 CD, écrit une vingtaine de livres, en étant poète, chauffeur, instituteur, chanteur, écrivain, directeur de festival et de l’Office de Tourisme, historien… Quelle vie !

Pascal Gaymard

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