HOMMAGE : Jean-Loup Dabadie : De la Plume et de la Voix…

Avec son éternelle chevelure blanche, Jean-Loup Dabadie n’avait plus d’âge, il semblait immortel, lui qui était devenu Académicien en 2008, le 1er saltimbanque, voisin de Valéry Giscard d’Estaing au sein de la noble institution.

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Cette nomination dont il était si fier, il l’avait méritée tant lui qui cumulait les fonctions d’écrivain, de journaliste, d’auteur de sketchs, de parolier ou encore de scénariste.

Des sketchs surtout pour Guy Bedos dont « La Drague »…

Jean-Loup Dabadie, c’était le couteau suisse du show-biz français. Il savait tout faire et plutôt  bien, certains osaient même le terme de « génie ». À l’heure du bilan d’une vie si riche, il faut passer par l’énumération. À 19 ans, il écrit son premier roman, « Les Yeux Secs »…, ce qui lui permet de séduire le grand Lazareff qui l’embauche comme journaliste à France Soir, le grand quotidien parisien de l’époque. Il collabore à la revue Tel Quel aux côtés d’un certain Philippe Sollers. Mais contrairement à ce dernier, Jean-Loup Dabadie ne se prend pas au sérieux et enchaîne en écrivant des sketchs pour plusieurs humoristes comme Guy Bedos qu’il a rencontré à la TV dans les émissions de Jean-Christophe Averty. Cela donnera des textes mythiques comme celui de « La Drague », de « Bonne Fête Paulette » entre autres. Ce sera 10 ans de complicité avec quelques infidélités du côté de Sylvie Joly, Pierre Palmade, Muriel Robin.

300 chansons, dont celles pour Polnareff, et Julien Clerc surtout…

Mais ce sont les chansons qui vont le rendre célèbre avec des paroles exceptionnelles pour Michel Polnareff (On ira tous au Paradis, Dans la Maison Vide, Holidays, Lettre à France), Julien Clerc (Le cœur trop grand pour moi, Femmes je vous aime, Ma préférence), puis pour Michel Sardou, Serge Reggiani, Yves Montand, Barbara, Sacha Distel, Claude François, Juliette Gréco, Johnny Hallyday, Enrico Macias, Nicoletta, Sylvie Vartan, Henri Salvador… Au final, il en réalisera plus de 300… Son inspiration, il la puise dans la France moyenne, la crise de la quarantaine, toutes les ruptures qu’elles soient amoureuses, professionnelles, émotionnelles… Le chômage, les errances des jeunes, les cadres largués, tous ces textes sont empreints de nostalgie et de tendresse. Le temps des copains, voilà bien son leitmotiv, l’amitié masculine… Il aimait aussi le sport, le tennis qu’il pratiquait régulièrement et le football avec son équipe favorite, celle qu’il suivait toujours, l’OGC Nice…

50 films, dont ceux de Claude Sautet, et d’Yves Robert surtout…

Cet univers épousera parfaitement les préoccupations d’un Claude Sautet dont il deviendra le scénariste attitré avec Les Choses de la vie, César et Rosalie, Vincent Paul François et les autres, Une Histoire Simple, et un autre grand réalisateur, Yves Robert pour Un éléphant ça trompe énormément, Nous irons tous au Paradis, Salut l’Artiste… mais encore François Truffaut (Une belle fille comme moi), Jean-Paul Rappeneau (Le Sauvage), Claude Pinoteau pour La Gifle, Philippe de Broca avec La Poudre d’Escampette… Au final, plus d’une cinquantaine de films dont le dernier aurait dû être Les Volets Verts, l’adaptation d’un roman de Georges Simenon dont le premier rôle aurait été tenu par Gérard Depardieu… Il disait, « Le métier de scénariste doit se faire dans une ombre infinie ». Au fait, vous n’allez pas me croire mais Jean-Loup Dabadie avait 81 ans. Sa discrétion n’avait d’égal que son élégance et son humilité. Un grand Monsieur…forcément Immortel.

Pascal Gaymard