ACTUS SOCIALES : Le recours à la vaccination contre la Covid-19 en milieu professionnel

En France, les premières vaccinations contre la Covid-19 doivent débuter à la fin de l'année. La question se pose de savoir si l’employeur peut imposer cette vaccination à ses salariés.

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Dans une perspective d’aide à la décision publique, la HAS anticipe les scénarios possibles de vaccination en France et formule des recommandations préliminaires sur les populations considérées comme prioritaires pour la vaccination dans un contexte de fortes incertitudes tant sur l’évolution de l’épidémie que sur les caractéristiques des vaccins en cours de développement.

Actuellement, les objectifs de santé publique de la vaccination contre la Covid-19 sont :

  • La réduction des hospitalisations et des décès ;
  • Le maintien des activités essentielles du pays, particulièrement celles du système de santé pendant l’épidémie. 

Deux critères principaux ont été pris en compte par la HAS pour établir cette priorisation : 

  • L’existence d’un facteur de risque individuel de développer une forme grave de la maladie ;
  • L’exposition accrue au virus.

La HAS a rappelé qu’elle ne préconise pas, à ce stade, de rendre obligatoire la vaccination contre la Covid-19. 

L’institution considère toutefois que, dans tous scénarios envisagés, les professionnels de santé et du médico-social de premières lignes constitueront les cibles prioritaires incontournables de la vaccinationrépondant aux objectifs de prévention individuelle, collective et de maintien des activités essentielles du pays en période épidémique.

Les personnes à risque de formes graves qui paient le plus lourd tribut en termes d’hospitalisation et de décès, les personnes âgées de plus 65 ans et celles présentant une comorbidité, seraient également viséesprioritairement par la vaccination.

Une deuxième phase de vaccination devrait se poursuivre et être mise en œuvre parmi les populations les plus susceptibles de se contaminer : les personnes vivant en collectivité ou dans des conditions favorisant la promiscuité (hôpital, EPHAD, prisons, hébergements collectifs) et les personnes fréquentant des lieux propices aux contacts multiples (entreprises, lieux clos, transports en commun).

Enfin, la troisième phase serait de cibler les personnes de l’entourage des personnes fragiles (personnes jeunes et sans comorbidités) et tout particulièrement des personnes à risque qui ne pourraient pas être éligibles à la vaccination en raison d’un rapport bénéfice/risque inconnu ou défavorable.

(Données HAS sous réserve de l’évolution et au fur et à mesure de la progression des connaissances et de la mise à disposition des doses de vaccins).

La vaccination obligatoire en milieu professionnel

Dans le cadre de la prévention des risques professionnels, certaines vaccinations sont déjà obligatoires pour les professionnels exerçant dans des établissements de prévention, de soins ou hébergements des personnes âgées. Conformément aux dispositions de l’article L. 3111-4 du Code de la santé publique, les professionnels de santé ainsi que les élèves et étudiants des professions médicales et paramédicales sont soumis à une vaccination obligatoire qui varie en fonction des lieux dans lesquels ils exercent ou de la nature de leur activité. Ces populations à risque d’exposition professionnelle ont une priorité très élevée et concernent environ 1 800 000 personnes.

Il est ainsi vraisemblable que les personnels des établissements ou organismes publics ou privés dans lesquels la vaccination des travailleurs est obligatoire, fixée par l’arrêté du 15 mars 1991, puissent être visés également par cette obligation vaccinale au Covid-19.

En dehors de ces cas et à ce stade, le coronavirus ne fait pas partie des agents biologiques infectieux spécifiquement visés par l’obligation vaccinale.

Il ne peut donc être reproché à l’employeur son attentisme pour ne pas l’avoir respecté puisqu’elle n’est pas une contrainte normative. Il fait en revanche partie des risques censés être évalués et pour lesquels des mesures de prévention doivent être envisagées.

Notons que parmi les autres populations dites à priorité élevée (autour de 5 millions de personnes), la vaccination reste fortement recommandée. Cette priorité élevée concerne des populations exposées du fait de leur emploi ou bien du fait de leur type d’hébergement. On retrouve ainsi les personnels au contact de la population : les commerçants, guichets fonction publique, banques, enseignants, restaurants, transports en commun, personnel de l’hôtellerie, les services d’aide et de soins à domicile, les hôtesses de caisse, les enseignants, les chauffeurs de bus … – Les personnels ayant un emploi stratégique : les policiers, sapeurs-pompiers volontaires et professionnels, militaires actifs … – Les personnels travaillant en milieux confinés à risque : les abattoirs, croisières, taxis… – Et enfin, les personnels ayant des conditions d’hébergement en milieu confiné : les travailleurs migrants, les sites de construction…

Dès lors, quelle que soit la nature de la vaccination, obligatoire ou recommandée, celle-ci ne doit être réalisée qu’après une évaluation du risque encouru et une information du salarié sur la nature de ce risque et le moyen de s’en prémunir.

La vaccination est prise en charge financièrement par l’employeur si elle est justifiée par un risque professionnel. Soulignons que l’employeur doit également requérir l’accord explicite du salarié.  Bien entendu, un salarié peut en être dispensé pour contre-indication médicale (grossesse, allergies, certaines maladies ou traitements en cours, etc..).

Le refus (ou l’impossibilité) de vaccination obligatoire par le salarié peut faire obstacle au recrutement ou limiter le champ d’activité professionnelle, voire même constituer un motif de licenciement. En effet, l’article L. 4121-1 du Code du travail précise que l’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, l’obligation de protection de la santé pèse ainsi sur l’employeur.

L’inertie de l’employeur pourrait donc être sanctionnée dès lors que la réglementation applicable à l’entreprise impose la vaccination du salarié et que la vaccination ait été prescrite par le médecin du travail. En milieu professionnel, la vaccination contre la Covid-19 peut en effet être préconisée par le médecin du travail au titre des actes préventifs (avec accord de principe de l’employeur) afin d’éviter tout litige dans l’hypothèse d’un accident post-vaccinal qui pourra alors être considéré comme un accident du travail.

Le salarié, quant à lui, est tenu de respecter scrupuleusement les règles applicables en matière de protection de la santé et de la sécurité définies par la loi et le dispositif normatif d’entreprise.

La Cour de cassation avait statué en ce sens en 2012. Elle avait précisé qu’en cas de refus du salarié d’être vacciné, le licenciement du salarié était tout à fait justifié dès lors que la réglementation l’imposait et que le salarié ne souffrait d’aucune contre-indication médicale.

Toute la difficulté va donc résider dans le caractère obligatoire ou non de la vaccination contre la Covid-19 et qui seront les personnels visés par ladite obligation.

Sources :

Article L 4121-1 du Code du travail, article L. 3111-4 du Code de la santé publique

VACCINS CONTRE LE SARS-CoV-2, rapport du 9 JUILLET 2020 « UNE STRATEGIE DE VACCINATION » – CARE -Comité scientifique COVID-19

Rapport HAS – Anticipation des scénarios possibles de vaccination et recommandations préliminaires sur les populations cibles – Décision n° 2020.0191/DC/SEESP du 23 juillet 2020 du collège de la Haute Autorité de santé

Communiqué de presse HAS du 30 novembre 2020

Véronique LA ROSA

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