SELFIE : Manu Payet et Cyril Gelblat, accrocs aux réseaux sociaux…

Au Pathé Gare du Sud, le réalisateur niçois, Cyril Gelblat (Les Murs Porteurs) et le comédien, Manu Payet, ont présenté le film à sketchs, SELFIE sorti le 15 janvier dans les salles.

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Sur ce phénomène de société qui agace prodigieusement le délégué général du Festival de Cannes chaque année sur les marches, 5 metteurs en scène ont planché dont le Niçois, Cyril Gelblat, qui a réalisé son segment « Recommandé pour vous » avec comme acteur, Manu Payet, avec lequel il avait déjà tourné « Tout pour être heureux ». Très complices, ils se sont livrés au jeu de nos questions.

Le Petit Niçois : Avez-vous choisi votre « segment » ?
Cyril Gelblat : Effectivement. J’étais au début du projet mais je n’avais pas le temps de réaliser tous les 5 films courts. C’est moi qui ai proposé 5 metteurs en scène différents. J’aurai été incapable de faire les segments de Marc Fitoussi avec Elsa Zylberstein et Max Boublil par exemple. Le scénario du départ et sa conclusion étaient trop cruels. J’ai besoin d’aimer mes personnages, comprendre ce qu’ils font mal. Sur « Recommandé pour vous », j’ai aimé le rapport homme/machine. Le personnage joué par Manu Payet est accroc à son algorithme mais le film reste bienveillant.

LPN : Quel était le défi technique des 5 films ?
CG : Nous avions 7 semaines pour tout réaliser. Le mien, je l’ai fait en 6 jours. C’est un timing très serré. Pour qu’il y ait une cohérence, une identité visuelle, tous les films devaient être réalisés par la même équipe technique. Chaque réalisateur avait sa méthode, cela a été très dur pour les techniciens de s’adapter à chacun. Ils ont terminé le tournage, éreintés.

LPN : Et pour le choix des castings ?
CG : Chaque réalisateur avait le choix de son casting. Moi, j’avais très envie de tourner à nouveau avec Manu Payet. Il a cette faculté à créer de l’empathie avec le spectateur qui peut facilement s’identifier à lui. Tout le monde a subi ce type de comportement ou dispose d’un exemple autour de soi de personne addicte aux suggestions d’achat de son mobile.

LPN : Quelles ont été vos influences ?
CG : Sur le tournage, bien sûr que l’on parlait beaucoup de la série des Monstres de Dino Risi ou encore des Nouveaux Sauvages pour leur humour cynique et noir. Avec SELFIE, nous voulions un rire amer et grinçant.

Manu Payet : Je me suis beaucoup amusé sur ce tournage. C’était très ludique. Il est vrai qu’aujourd’hui, avec les réseaux sociaux et les applis, on peut vite être accroc…

CG : C’est un rapport dominant/dominé qu’impose l’algorithme. Moi-même, je suis tombé amoureux d’un engin de massage que j’offre à tout le monde…, tout comme le personnage de Manu est accroc à la pêche… Amazon rend service mais fout un bordel pas possible, y compris dans la production cinématographique.

MP : Le film est un miroir comme un selfie. Nous passons beaucoup trop de temps devant nos écrans et quand on arrive, comme moi à la Réunion dernièrement, à faire baisser notre temps, on est heureux et fier… C’est une mini-victoire.

LPN : Quel rapport avez-vous avec les selfies ?
CG : Je n’ai rien contre le fait d’immortaliser des moments. Mais quand les gens ne viennent que pour un selfie, cela devient pesant et pose un problème du rapport à l’image. Que vont-ils en faire ? Je suis d’ici, j’attendais les places devant les marches du Palais pour grimper dans les salles. Alors, je comprends de faire un selfie sur le tapis rouge. C’est cette proximité avec le Festival de Cannes qui a changé ma vie et m’a donné envie de faire du cinéma.

MP : Le seul moment où je refuse un selfie, c’est quand on me demande une photo avec un mec connu… Le gars ne sait même pas qui je suis. Sinon, en général, je dis toujours oui en général. C’est agréable de faire plaisir à son public.

CG : Avant, on demandait un autographe, je préfère cette démarche que j’ai aussi faite…avec les joueurs de l’OGC Nice.

LPN : Quel rapport avez-vous au film ?
CG : Je trouve que les scénaristes ont trouvé des situations pas évidentes et universelles. C’était agréable à tourner et à regarder. Nos vies ont changé en 10 ans, c’est bien qu’il y ait un film qui parle de ça. J’ai beaucoup appris du travail des autres réalisateurs.

MP : Tous les comédiens sont très justes. Elsa Zylberstein m’a scotché, Blanche Gardin aussi comme Finnegan Oldfield ou Julia Piaton avec laquelle j’avais très envie de tourner, on est mais dans la vie… J’adore également le travail de Vianney sur le mariage, à la fin du film.

LPN : Quel rapport à Nice ?
CG : Nice, c’est ma ville. C’est important de montrer mes films ici. Pour SELFIE, c’est la dernière date…

MP : Pour moi, Nice, ce sont des adresses, La Merenda, La Petite Maison, Davia… J’entretiens un rapport particulier avec Nice. Le dernier plan de « Tout pour être heureux » avec Cyril (Gelblat), nous l’avons tourné ici. C’est Raphaëlle, sa propre fille, qui me donnait la réplique.

CG : C’est la première fois que tu étais Papa au cinéma…

MP : C’est vrai. Le matin du tournage de cette scène, ma femme m’a appelé et m’a dit : « Maintenant, il faut que tu me dises : tu ne veux pas d’enfant ? ». Je suis remonté à Paris et j’ai décidé de faire un enfant, d’assumer. Cette décision, je l’ai prise à Nice. Ma compagne m’a annoncé qu’elle était enceinte 3 jours après la sortie du film…

CG : Tu m’as dit un jour que c’est le film, « Tout pour être heureux », qui t’a donné envie de faire des enfants… Audrey Lamy, ta femme dans le film, m’a dit la même chose…

MP : Tout ça, est véridique…

LPN : Quels projets ?
CG : Mon prochain film, EN SON ABSENCE, sera intégralement tourné à Nice. Ce sera un drame dans le milieu des maraîchers du cours Saleya et de l’univers de la lutte. C’est plus difficile aujourd’hui de monter un financement.

MP : Ma tournée touche à sa fin, soit 238 dates au total et 2 ans et demi face au public. Mes dernières dates, c’était à La Réunion, chez moi, il y a 3 semaines. Maintenant, il faut que je me remette à écrire un nouveau spectacle, c’est la phase la plus difficile. J’ai aussi un tournage en cours, mais rien n’est signé…

Propos recueillis par Pascal Gaymard