Jour J + 2 : Jeudi 10 Mai 2018
Décidemment, les « Feel Good Movies » sont florès à Cannes cette année. Après Yomeddine, voici LETO soit « L’été » de Kirill Serebrennikov, le grand absent du jour car assigné en résidence à Moscou. La cause ? Une subvention d’1 million de roubles qu’il aurait indument touché de l’Etat Russe pour financer son théâtre Gogol qui connaît un grand succès dans la capitale. En fait, il s’agit d’un changement de ministre, le nouveau ayant pris en grippe le prodige Russe qui excelle au théâtre, au cinéma, à l’écriture… C’est bien dommage car son LETO donne finalement une belle image de la jeunesse soviétique entre 1960 et 1990. Surtout, Serebrennikov ose tout : noir & blanc, images animées, couleurs, bulles, inserts, réalités et imaginaires, c’est Rock, ça donne envie de danser, de baiser, de boire plutôt de s’enivrer, d’écrire, de chanter, de bouger, de transgresser, d’aimer Natacha (, de vivre, bordel ! Let’s dance… mais pas que Bowie, Lou Reed, Bondie, les Rolling Stones, Les Beatles, Led Zeppelin, AC/DC, le Bleu Velvet, les Sex Pistols…
J’en oublie mais que c’est bon de revivre les premiers pas des groupes Rock underground soviétiques à une époque où c’était pas forcément facile à faire, à dire, et à vivre… Le Festival de Cannes commence fort… Par contre, le Christophe Honoré, Plaire, Aimer et Courir Vite, n’apporte pas grand-chose de plus à la filmographie de l’auteur. Mais force est de reconnaître que tous les acteurs sont exceptionnellement justes et authentiques. Il y a aussi de vrais moments de poésie dans ce film chorale où le spectateur peut se perdre. Vincent Lacoste, Pierre Deladonchamps, Denis Podalydès, sont tous les trois des amoureux de l’amour au masculin qui ne demandent qu’à rencontrer l’âme sœur… Il est vrai que la Semaine de la Critique avait programmé Sauvage de Camille Vidal-Naquet qui a passé trois ans avec les prostitués hommes des ponts de Paris et qu’il en a sorti un film bien plus dangereux, dur, définitif que celui de Christophe Honoré… Dans la confrontation des deux, Sauvage l’emporte aisément avec un Félix Maritaud qui confirme après 120 Battements par minute… A Un Certain Regard, A Genoux les Gars d’Antoine Desrosières, aurait pu être un véritable coup de poing de ce Festival avec cette histoire de sex-tape qui tourne mal. Le film reste trop bavard et pas assez âpre pour laisser sa trace durablement… La bonne surprise est venue d’un autre film, celui d’Ali Abbasi en provenance de Suède, GRANS, avec une histoire inclassable où le thriller se mélange à la romance puis au fantastique.
Enfin, à la Quinzaine des Réalisateurs, Les Confins du Monde de Guillaume Nicloux était très attendu avec un casting magnifique où l’on retrouve Gaspard Ulliel, Guillaume Gouix et Gérard Depardieu. Le film sur le thème de la vengeance sur fond de guerre d’Indochine tient plus de la boucherie qu’autre chose. Il déçoit quelque peu ceux qui sont des habitués de l’œuvre de l’auteur. Une guerre, par essence, n’est jamais « propre »… Mais la grande nouvelle du jour est venue d’une autre guerre devant les tribunaux qui ont débouté la demande du producteur, Paolo Branco, qui, sous des prétextes fallacieux, voulait interdire la projection du film de clôture, The Man Who Killed Don Quixote de Terry Gilliam. Qualifié de « bandit » par Thierry Frémaux, ou de « voyou » par les vrais producteurs du film, Paolo Branco ne sort pas glorieux de cette affaire qui dévoile sa vraie personnalité faite de mépris et de malhonnêteté comme l’a souligné le juge des Référés.