Foutraque serait le terme approprié pour qualifier cette journée ! En Compétition Officielle pour la Palme d’Or, deux films qui se ressemblent dans leur traitement. Le dernier Wes Anderson, THE FRENCH DISPATCH, est un hymne à la France. Il revisite tous les grands moments de notre histoire récente du XXe siècle et en fait des archétypes traités à la manière d’un journal. Son casting est impressionnant : Léa Seydoux, Benicio del Toro, Timothée Chalamet, Élisabeth Moss, Saoirse Ronan, Edward Norton, Christoph Waltz, Frances McDormand, Kate Winslet, Adrien Brody, Willem Dafoe, Mathieu Amalric, Lyna Khoudri, Cécile de France, Vincent Macaigne et bien sûr Bill Murray. L’image, le son, les décors sont remarquables. Mais le film fonctionne en forme de saynètes qui sont forcément inégales. Celle avec Léa Seydoux et Benicio del Toro via Adrien Brody sort du lot et font de THE FRENCH DISPATCH, un film intéressant.
Avec LA FIÈVRE DE PETROV de Kirill Serebrennikov, évoque les rêveries, voire les délires d’un ivrogne en bordée noire. Au bout du compte, un film décousu au montage approximatif qui ne convainc personne. Nous sommes loin de Leto (L’été) qui aurait dû valoir au réalisateur maudit russe, une Palme d’Or en 2018. Nouveauté, cette année, Kirill Serebrennikov était présent à la conférence via skype. Son film est un long manifeste contre ses propres concitoyens forcément ivrognes, racistes, violents. En séance spéciale, LES HÉROÏQUES de Maxime Roy va à l’encontre du pessimisme exprimé par le réalisateur russe. François Creton incarne le loser parfait du XXIe siècle lui aussi alcoolique voire aussi toxico à ses heures. Mais il trouvera dans le regard de son fils, Roméo Creton, à l’écran comme à la ville, la force de caractère de s’en sortir. Il donne un peu d’espérance à tous les déclassés de la vie.
Le vrai coup de poing de cette journée a été sans aucun doute, BAC NORD de Cédric Jimenez (La French) où nous retrouvons Gilles Lellouche, François Civil, Karim Leklou, Adèle Exarchopoulos, en policiers chargé de faire régner un semblant d’ordre dans les quartiers Nord de Marseille réputés comme étant la cité la plus dangereuse d’Europe. Tiré de faits réels, le scénario est quasi-documentaire et fait froid dans le dos. Ces héros des temps modernes que sont ces flics de la BAC, risquent leur vie tous les jours pour moins de 2000 euros par mois. Alors, quand ils arrivent enfin à réaliser un gros coup de filet en arrêtant plusieurs caïds du trafic de drogue grâce à un indic, ils ont la police des polices sur le dos et doivent subir l’opprobre de leur propre hiérarchie, du préfet, voire du ministre, un certain Manuel Valls, bien qu’ils n’aient fait que répondre aux ordres… Le procès des flics de la BAC s’est tenu il y a quelques mois et ils ont tous été relaxés avec pour certains de la prison avec sursis ce qui prouve bien leur innocence et leur honnêteté. Pourtant, l’État français a fait appel du jugement ! Honte à ces politiciens qui dénaturent leur fonction ! Et après, on s’étonne que plus personne ne veuille aller voter… À Cannes, tout est politique, souvent pour le meilleur (BAC NORD), parfois pour le pire (Les Misérables).
Pascal Gaymard & Véronique Rosa