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DROIT : Inquiétude sur le projet de réforme de la police nationale

Le projet de réforme de la police nationale irrite la police judiciaire (PJ) et inquiète les magistrats. Il prévoit de réunir sous une même direction dans chaque département la police aux frontières, la sécurité publique, les renseignements et la police judiciaire. Explications.

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Présentée comme une simple réorganisation administrative, cette réforme risque de priver l’État des moyens de lutter contre le crime organisé et la délinquance financière, dénonce un collectif de magistrats, de policiers et de citoyens (La Tribune, Le Monde).

Qu’est-ce que prévoit la réforme de la PJ ?

Plus d’un siècle s’est écoulé depuis la création des Brigades du tigre, l’ancêtre de la police judiciaire, qui avait permis de créer une police spécialisée mobile, affranchie des limites territoriales, disposant d’un budget et d’un effectif autonomes face à des réseaux criminels toujours plus forts et géographiquement sans frontières. Un projet ambitieux et visionnaire porté par le ministre de l’Intérieur de 1907, Georges Clemenceau. Pourtant l’actuel ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, s’apprête à revenir à une départementalisation de la police à compter de 2023, en unifiant le commandement des différents services de police sous l’autorité d’un directeur départemental de la police nationale (DDPN), appelé à devenir le seul interlocuteur du préfet sur les questions touchant à la sécurité intérieure. Dans la nouvelle organisation prévue, les fins limiers de la PJ, spécialisés dans les affaires complexes, qui jusque-là ne rendaient de compte qu’à l’autorité judiciaire directe, perdraient leur indépendance et leur technicité pour rejoindre les enquêteurs de la sécurité publique compétents pour les infractions de moindre envergure, la « petite » délinquance du quotidien. La question reste posée : qui sera compétent pour exercer la filière d’excellence, démantèlement des réseaux et gros trafics ?

La police judiciaire et les magistrats font front commun de la réforme 

Les magistrats sont tout aussi en colère parce qu’ils ne sont plus assurés de pouvoir choisir le service d’enquête. Le DDPN représente en effet le seul décisionnaire de la répartition des dossiers et des moyens dans ses différents services. En outre, l’expérimentation de la réforme effectuée depuis 2021 conduit à un constat alarmant : les priorités de politique pénale définies par les procureurs ne sont plus respectées, l’autorité judiciaire n’a plus d’autorité et de nombreux pans de la délinquance ne pourront plus être traités. On peut craindre également une remontée des informations vers la hiérarchie et le préfet local, ce qui peut être problématique sur certaines enquêtes sensibles comme la mise en cause des élus…Une faille dans l’indépendance du système de la police ? Pourtant, la Direction générale de la police nationale essaie de convaincre les troupes du bien-fondé de son projet dont l’objectif serait un traitement identique au champ criminel, aussi bien à la criminalité du quotidien que les crimes plus graves, et d’ajouter « cette réforme est nécessaire en considération du manque d’expertise de la police judiciaire en matière de budget et de ressources humaines ». Le modèle français de la PJ ayant fait ses preuves, la PJ sort des affaires importantes chaque jour, pourquoi changer une organisation qui fonctionne plutôt qu’améliorer son budget ? Les enjeux de l’indépendance et la recherche de l’efficacité devraient être placés en priorité.

Véronique La Rosa

(Source : Site Internet : https://www.vie-publique.fr/loi/284424-projet-loi-orientation-programmation-ministere-interieur-lopmi-2023-27)

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