Selon le communiqué, « il s’est éteint tranquillement ». C’est vrai qu’après son AVC en 2001, il était resté diminué mais toujours très actif.
« Un Trésor National »
Et puis, Bébel, c’est comme ça que la France entière et le monde l’avaient adopté, il était toujours bienveillant, amical presque paternel. Un sage et une icône du cinéma français dont il ne reste aujourd’hui que Brigitte Bardot et Alain Delon. Souvent, les critiques, les médias, le public même avaient essayé de les monter l’un contre l’autre notamment lorsqu’ils ont tourné Borsalino ensemble. Delon s’est dit « fracassé » par la nouvelle de sa mort, « je perds un ami de 60 ans »… Le chef de l’Etat parle d’un « trésor national » auquel un hommage national sera rendu aux Invalides le 9 septembre. Et tout le cinéma français et le monde culturel rivalisent de superlatifs à son égard. Il doit bien se marrer notre Bébel en les entendant tous, à l’heure où les machos virils testéronés n’ont plus la côte, à une époque où il n’y a pas de mots assez durs pour dénoncer ce type d’attitude qui a fait de Belmondo, le héros préféré des Français durant 30 ans. Gros flingue à la ceinture, coup de poing facile et définitif, humour ravageur, belles femmes à ses côtés… Son prof au Conservatoire, Pierre Dux, lui avait dit : « Avec votre physique et votre jeu, vous n’aurez jamais une jolie femme ». Il l’a croisé un jour sur les Champs-Élysées avec Ursula Andress à son bras. Et Bébel de lui lancer : « Vous voyez, j’ai fait ce que j’ai pu ! ». Cette anecdote racontée par Michel Drucker qui était son voisin et ami, résume assez bien le personnage. Toujours un brin moqueur mais jamais méchant. Et puis, jamais à refuser un autographe comme s’en souvient Mamo à Antibes ou Jo à Lou Balico à Nice.
De Godard à Verneuil en passant par De Broca et les autres…
Fils du sculpteur, Paul Belmondo, membre de l’Institut, il n’a pas brillé sur les bancs de l’école. Il lui a préféré les terrains de football ou encore plus, les rings de boxe. Cela formera son caractère bien trempé. Après deux échecs, il entre au Conservatoire dont il en sortira qu’avec un accessit bien injuste. Il sera porté en triomphe par ses amis, Jean Rochefort, Bruno Cremer, Jean-Pierre Marielle, Pierre Vernier…et fera un joli bras d’honneur aux membres du Jury. Son 1er grand succès, il le doit à la Nouvelle Vague qui se cherche un jeune premier qui ne ressemble pas aux canons suisse lui offrira un autre grand rôle, Pierrot le Fou qui le fera entrer au Panthéon des Pieds Nickelés. Chabrol, Truffaut, Resnais suivront, avec lequel il tournera l’excellent Stavinsky qui fera un flop au Festival de Cannes en 1974. Et puis, ce sera le superbe Léon Morin prêtre de Jean-Pierre Melville, réalisateur avec lequel il tournera aussi Le Doulos, L’Aîné des Ferchaux… Mais Un Singe en Hiver l’impose parmi les grands. Ce jeune écervelé aux côtés du patriarche, Jean Gabin, est son doute son meilleur rôle pour un film qui restera comme un authentique chef-d’œuvre signé Henri Verneuil. Il jouera dans de nombreux films de cet immense réalisateur pas assez reconnu, 100000 $ au Soleil, Weekend à Zuydcoote, Le Corps de mon ennemi, Les Morfalous.
Un homme comblé en amour
La rencontre avec Philippe De Broca le fera basculer dans la comédie populaire qui lui assurera le succès pour 30 ans, les glorieuses années Bébel. Tout débutera avec L’Homme de Rio, puis Les Tribulations d’un Chinois en Chine, L’incorrigible, Le Magnifique… Avec Georges Lautner, Flic ou Voyou tourné à Nice tout comme Joyeuses Pâques, mais aussi Le Professionnel, L’Inconnu dans la Maison. Gérard Oury pour L’As des As, Le Cerveau notamment, ou Le Marginal et Le Solitaire avec Jacques Deray, film qui clôturera cette série. Comment oublier aussi son personnage de vieux sage dans Itinéraire d’un enfant gâté qui ressemble tant à une déclaration qu’il aurait pu faire. Le plaisir se lisait dans ses yeux, Bébel en a bien profité, lui qui avait écrit un livre sur ses Mille et une Vies qui en valent mieux qu’Une… Côté cœur, il aura été également chanceux avec tout d’abord la danseuse, Élodie Constantin qui lui donnera trois enfants, Patricia, (morte en 1994 dans l’incendie de son appartement), Florence née en 1960 et Paul en 1963. Comme souvent après, c’est sur un plateau de cinéma, celui des Tribulations d’un Chinois en Chine que Bébel s’éprend de la belle Ursula Andress pour 7 ans d’une liaison tumultueuse : « C’est une belle tigresse terriblement jalouse » dira-t-il. Puis, Laura Antonelli sera à ses côtés pour 8 années plus paisibles, elle qu’il avait rencontrée sur le tournage des Mariés de l’An II. Et ce sera encore sur un tournage, celui du Marginal qu’il rencontre Carlos Sotto Mayor, là encore pour 7 ans d’union. La suivante, Natty Tardivel lui donnera une autre petite fille, Stella, « le plus beau des cadeaux » à 70 ans. Après 9 ans, ils se séparent en ayant vécu de durs moments comme la disparition de Patricia en 1994. Il s’affiche désormais aux bras de Barbara Gandolfi de 44 ans sa cadette. L’escort girl sera accusée d’escroquerie avant d’être acquittée. Elle sera restée 4 ans avec l’acteur très amoindri par son AVC. Ces derniers temps, il se serait à nouveau rapproché de Carlos Sotto Mayor. Nous garderons l’hommage rendu lors du Festival de Cannes 2011 pour de sa Palme d’Honneur, lui qui n’était pas allé chercher son César pour Itinéraire d’un enfant gâté en 1989 (histoire de sculpteurs entre César et son père). Sa réconciliation avec les César se fera en 2017 avec un hommage « magnifique » de Jean Dujardin à celui qu’il considère toujours comme son mentor…
Pascal Gaymard
Mon TOP 10 des Meilleurs Bébel
- UN SINGE EN HIVER
- PIERROT LE FOU
- BORSALINO
- A BOUT DE SOUFFLE
- ITINERAIRE D’UN ENFANT GATÉ
- LE MAGNIFIQUE
- LEON MORIN PRETRE
- FLIC OU VOYOU
- PEUR SUR LA VILLE
- L’HOMME DE RIO