Par Pascal Gaymard – Photos Dominique Maurel
Mercredi 21 Mai : VALEUR SENTIMENTALE, une Valeur en OR ?
En ce mercredi, on est bien obligé de penser que nous sommes plus proche de la fin que du début du Festival. Cela va si vite… En Compétition, les films se suivent et ne se ressemblent pas… Avec ROMERIA, la réalisatrice Catalane, Carla Simon, nous emmène sur les traces de la famille biologique de Marina (Llucia Garcia) afin d’avoir un document administratif en vue d’obtenir une bourse d’étude de… cinéma… Mais en atermoiements en révélations sur son passé, Marina va se rendre compte qu’elle ne connaît rien de son histoire… Et le spectateur est perdu et commence à se désintéresser de cette quête identitaire. Dommage. THE HISTORY OF SOUND du réalisateur Sud-Africain, Oliver Hermanus est plus maîtrisé côté récit. On suit les tribulations de Lionel, jeune chanteur talentueux, qui rencontre au Conservatoire de Boston en 1917, David, un étudiant en Composition. Leur complicité artistique va se doubler d’un rapprochement amoureux qui va bouleverser leur avenir. L’Anglais, Josh O’Connor, et l’Irlandais, Paul Mescal, forme un couple des plus crédibles, un peu à l’image du Secret de Brokeback Mountain avec Heath Ledger et Jake Gyllenhaal. Mais cela serait étonnant et une vraie surprise si ce film apparaissait au palmarès de ce Festival…
Dans l’amitié mais sans ambiguïté ce coup-ci, le drame indien, HOMEBOUND de Neeraj Ghaywan, présenté à Un Certain Regard, est une vraie réussite. Deux amis d’enfance, pour sortir des humiliations successives dues à leur caste et leur religion (musulmane) décident de tenter le concours d’entrée pour devenir gardien de la paix. Mais il y a plus de 3000 candidats pour quelques centaines de postes… Quand l’un est pris et l’autre non, leurs relations changent… Nul doute que cette très belle histoire sur fond de Covid devrait émouvoir les membres du Jury de cette sélection officielle.
Côté Palme d’Or, est-ce qu’un des favoris d’avant Festival va s’affirmer ? Il s’agit bien sûr du drame signé Joachim Trier, VALEUR SENTIMENTALE. Le réalisateur norvégien est un habitué de Cannes puisqu’il y a présenté Oslo 31 Août, Back Home et surtout Julie (en 12 Chapitres) qui a valu à sa muse et actrice fétiche, Renate Reinsve, un prix d’interprétation à Cannes en 2021. Avec VALEUR SENTIMENTALE, il introspecte la relation père/fille dans le milieu du théâtre et du cinéma. Les considérations entre ces deux formes d’Art sont des plus intéressantes entre Stellan Skarsgard et Renate Reinsve. Mais au-delà, c’est toute la problématique du couple, de l’absence du père, de la culpabilité, qui est mise en abîme avec le talent d’un metteur en scène qui est l’un des plus talentueux de sa génération. Alors Palme d’Or pour Joachim Trier ? Pourquoi pas ? Au casting, on retrouve Elle Fanning dans son propre rôle de comédienne, hésitante et lumineuse, un vrai moment de bonheur de cinéma…
Mais la journée nous a réservé une belle surprise avec un documentaire, THE SIX BILLION DOLLAR MAN, présenté en séance spéciale sur Julian Assange. Le réalisateur, Eugene Jarecki, nous fait visiter de l’intérieur la vie de stress et d’emprisonnement de ce lanceur d’alerte hors du commun dans l’Ambassade d’Equateur. S’il a été protégé par le président Correa, cela n’a plus été le cas avec son successeur qui pourtant s’était engagé à respecter la promesse de protéger Julian Assange. Mais une semaine seulement après sa prise de pouvoir, suite à un prêt énorme des États-Unis de 6,5 milliards de $, les bonnes résolutions du président, Lenin Moreno, se sont envolées comme neige au soleil. La machination avec des accusations de viols fabriquées de toutes pièces, les pressions US imposant une peine de 175 ans de prison pour espionnage, la surveillance vidéo 24H/24,les trahisons, les intimidations, les tortures psychologiques, l’emprisonnement très dur en Angleterre, rien n’a pu abattre ce journaliste qui est l’honneur de la profession, le meilleur d’entre nous… Un exemple.
