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CINÉMA – Leonardo Di Costanzo : « L’enfermement n’est pas la solution »

Le réalisateur d’ARIAFERMA, Leonardo Di Costanzo, était au cinéma Jean-Paul Belmondo le mardi 22 novembre. Une occasion d’évoquer son superbe film qui a reçu deux Donatello (équivalent des CESAR en Italie), pour le Meilleur Acteur à Silvio Orlando, et pour le Meilleur Scénario. Il a aussi reçu le Globe d’Or de la presse étrangère pour les mêmes récompenses. Il s’est livré au Petit Niçois.

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Le Petit Niçois : Comment vous est venue l’idée de départ d’ARIAFERMA ?

Leonardo Di Costanzo : Dans tous les sujets que j’ai abordé lors de mes documentaires, l’idée d’analyse des institutions est centrale. Pour ce film de fiction, il en a été de même. Je voulais aborder l’univers carcéral. En Sardaigne, il y a beaucoup de prisons. J’ai trouvé celle-ci en centre-ville et je l’ai imaginé perchée dans les montagnes tel un château isolé du monde et des hommes. Un monde à part. Comme dans Le désert des Tartares. L’idée vient de ma documentation abondante mais après, il fallait trouver un lieu qui est également l’un des acteurs principaux du film. J’ai travaillé avec mes deux coscénaristes. Il a fallu un an pour aboutir à ce récit. Je suis assez long dans la phase d’écriture.

LPN : Quelle est la phase que vous préférez dans l’élaboration d’un film, le scénario, la réalisation, le montage, la post prod, la sortie avec ses interviews… ?

LDC : J’aime l’écriture mais le montage est peut être la phase que je préfère. Le film prend forme sous nos yeux. Les monteurs devraient demander des droits d’auteurs, ils équilibrent tout.

LPN : Comment avez-vous travaillé avec deux grands comédiens comme Toni Servillo et Silvio Orlando, des lectures avant ?

LDC : Non, pas de lectures. Je travaille comme au théâtre avec beaucoup de répétitions sur le plateau car nous avions des acteurs professionnels et d’autres non professionnels, tous les prisonniers et quelques gardiens. Certains d’ailleurs s’étaient croisés dans al vraie vie, en prison… Mon principal souci sur ce film était la crédibilité et les pros ont apporté leur savoir-faire et les non pros, leurs expériences. Au final, cela a été profitable à tous. Je ne voulais pas que l’on fasse de différences à l’écran.

LPN : Comment avez-vous obtenu le concours de Toni Servillo ?

LDC : J’ai connu Toni (Servillo) au théâtre de Naples, quant il a débuté dans ce lieu expérimental. Il a joué là son premier spectacle. Silvio (Orlando) est aussi de Naples. Entre Napolitains, on se comprend, puis nous sommes de la même génération. Au début, les rôles étaient inversés, Toni devait jouer le prisonnier et Silvio le gardien mais cela me semblait trop facile. Alors, je leur ai proposé d’inverser leurs rôles. Toni m’a tout de suite dit oui. Pour Silvio, c’était plus dur car il pense qu’il n’a pas une tête de dur mais plutôt d’un comique. Il a fallu le persuader et il a gagné des prix, donc, il m’a remercié. Le rôle de Toni était plus difficile selon moi. Il fallait qu’il joue quelqu’un d’ordinaire. Il m’a dit qu’il avait pensé à son père en interprétant ce rôle de gardien de prison… Ca m’a touché qu’il dise ça. Il a peu de dialogues, tout passe par le non-dit, les silences, les regards, c’est très subtile et difficile. Il aurait mérité également un prix d’interprétation. L’acteur doit être mis dans un inconfort relatif pour donner le meilleur de lui-même.

LPN : Que vous a appris ce sujet ?

LDC : En Sardaigne, comme je vous l’ai dit, il y a beaucoup de prison, parce que c’est une île, parce qu’elle est peu peuplée, parce que pour les habitants, les prisons, c’est Fiat pour les Turinois. C’est le premier employeur. Ce que ça m’a appris, c’est que les prisonniers sont enfermés pour un temps et c’est violent. Quant ils sortent, ils ont encore plus la haine et 60 à 70% d’entre eux récidivent. A Bollate, une prison ouverte à Milan, les prisonniers signent un contrat avec l’administration. Au final, il n’y a que 2 à 4% de récidives à la sortie… Mais je comprends que pour la société, on veuille les punir de leur crime… Les gardiens, eux, sont en prison toute leur vie… C’est aussi dur pour les uns que pour les autres. C’est cela le thème central d’ARIAFERMA dont je fais la promo depuis un an.

LPN : Quel est votre prochain projet ?

LDC : Je ne sais pas encore. Je vais travailler avec toujours mes mêmes coscénaristes. Je suis lent à l’écriture, lent aussi pour me décider d’un sujet plutôt qu’un autre. J’écris beaucoup, je lis aussi énormément. Je rêverais de tourner un film comique mais je ne sais pas le faire !

Propos recueillis par Pascal Gaymard

NB : Le film est toujours à l’affiche à Nice au cinéma Jean-Paul Belmondo – 16, place Garibaldi.

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