Dans le cinéma français, il y a comédie et Comédie… et lorsque c’est Jan Kounen qui est derrière la caméra, nul doute qu’il se passait des choses… Vincent Lindon et François Damiens le savent bien et c’est pour cela qu’ils ont adhéré sans retenue au projet de MON COUSIN et qu’ils ont tenu à faire cette tournée… ensemble. Retours sur deux comédiens que rien n’effraie et qui ne sont pas dénués d’un certain sens de l’humour et d’un franc-parler faisant plaisir à voir et à entendre. Quant à Jan Kounen, il sera au cinéma Mercury de Nice le samedi 26 septembre à 20h30, pour une présentation/débat de son film.
Le Petit Niçois : Le film joue sur le personnage du « Fou », les acteurs belges (NDLR : Benoît Poelvoorde) sont-ils tous fous, François ?
François Damiens : Nous ne sommes pas tous fous même s’il y a Benoît (Poelvoorde) qui peut me faire de la concurrence. C’est que l’on est toujours à fond. Mais souvent, le « fou » n’est pas celui que l’on croit comme dans MON COUSIN (se tournant vers Vincent Lindon)…
Vincent Lindon : Mon personnage est bien barré aussi… Mais vous savez, c’est l’une des tournées que nous avons décidé de faire avec François (Damiens) qui est la plus importante et en même temps, la plus émouvante. On n’est pas obligé de le faire dans notre contrat. On peut toujours trouver une bonne excuse pour s’esquiver. Nous sommes venus car on aime le film, on ne s’est pas forcé à le faire. Il y a trois raisons majeures : cela aide le film auquel on croit, on fait un pas vers l’autre, vers le public, ce n’est pas rien de venir au cinéma aujourd’hui avec ce virus, c’est un acte de cinéphile, et puis, il faut envoyer un message fort, aller au cinéma, ce n’est pas plus dangereux que de faire ses courses !
FD : La tournée a été stoppée en mars dernier et on a décidé avec Vincent de la reprendre. Elle a été aussi longue que la durée du tournage (NDLR : 5 semaines et demie). C’est un devoir pour nous d’être là, pour rencontrer le public, échanger, avoir leur ressenti. On n’est pas là pour rien.
LPN : Pourquoi ce film est-il important pour vous ?
VL : Je pense que nous n’avons pas mesuré dans quel film nous étions. Pour ma part, je sais que c’était un bon film, cela se voyait à l’écriture. Je suis très étonné par l’émotion ressentie par les spectateurs. C’est une comédie, mais pas que… L’histoire touche à des valeurs essentielles : le respect de la nature, la différence, l’émerveillement de l’enfance, l’écoute, la famille…
FD : Nous avons été bien dirigés par un réalisateur, Jan Kounen, avec lequel j’avais failli faire un film il y a 5 à 6 ans. Nous étions restés en contact. Je savais qu’il allait amener un truc au film, son univers, sa patte, ses idées. Sa mise en scène est impressionnante. Mais ce sens de la technique, il la met au service de ses comédiens, de l’histoire, du tempo. Il est ouvert à nos propositions, il est délicat, subtil, c’est un artiste.
VL : Nous avons fait quelques répétitions. Sur le tournage, il faisait son petit bazar… Sa mise en scène est ultrasophistiquée. Il prend toujours les choses sous un angle différent… Jan Kounen est un être à part dans le cinéma, il est toujours avec son skate électrique, il mange des graines, il côtoie les chamans, il va souvent en Amazonie, il n’y en a pas deux comme lui.
LPN : Avez-vous participé au scénario ?
VL : Au départ, c’était déjà un bon scénario que m’a présenté le producteur, Richard Grandpierre, avec lequel j’avais envie de travailler. J’avais envie de faire le film, il me l’a donné pour que je mette mes commentaires. Puis, le scénario est passé à Jan Kounen qui a demandé à pouvoir l’agrémenter à son univers. Tout est dans le scénario, je le voyais en images en le lisant.
FD : Jan y a apporté une couche en plus. C’est un Tout ce film de Jan. Moi, j’ai apporté quelques petites retouches parfois. Il n’y a pas plus difficile que de vouloir faire rire les gens.
VL : J’avais envie de faire une comédie américaine de tradition française. L’idée de départ, c’était une histoire de famille où l’un empêche systématiquement l’autre de faire ce qu’il veut, tout le temps. Puis, les personnages évoluent l’un vers l’autre… L’adaptation qu’en a faite Jan Kounen, c’est un vrai travail encore plus difficile que d’écrire ex nihilo.
LPN : Avez-vous des références ?
FD : J’étais fou de mon grand-père. Il était comme Vincent, toujours au 1er degré. C’est génial d’observer Vincent jouer, j’ai appris beaucoup. Il est toujours à fond. Il m’a déjà fait mon emploi du temps de demain à Nice…
VL : Pour ma part, c’est mon père qui a toujours été ma figure inspirante. Je voudrais insister sur le rôle du producteur, Richard Grandpierre. Il est un vrai « producteur », il « produit », il regarde les rushs avec nous, il connaît son métier. Après sur les duos célèbres, bien sûr, Bourvil/De Funès, Depardieu/Pierre Richard, Belushi/Dan Aykroyd…
FD : Catherine Deneuve et Isabelle Adjani…
VL : Ça, c’est les blagues à François ! Cela faisait longtemps que je n’avais pas croisé le fer à deux. Quand on nous appelait sur le plateau, c’était toujours François et Vincent, c’était agréable.
LPN : Y a-t-il eu une scène plus difficile qu’une autre ?
VL : Celle de l’avion. C’était nos 4 premiers jours de tournage. Nous étions enfermés dans cette carlingue durant 9 heures, il faisait très chaud. On ne se connaissait pas avec François et là, on tombait dans les bras l’un de l’autre…
FD : C’est malin de la part de Jan Kounen, il nous a tout de suite mis en situation, en contact, en osmose car la scène était difficile à jouer et à tourner. Vincent était toujours devant le combo pour revoir la scène, moi non.
VL : Oui, mais à la fin, c’est lui qui était demandeur
LPN : Avez-vous des lubies ?
VL : Je ne peux pas parler et être pris en photo en même temps. Je ne suis sur aucun réseau social, je m’en moque. Je n’ai aucun ami ou ennemi… Je me fiche du regard de l’autre et de communiquer sur ce que j’ai mangé à midi, d’ailleurs une tomate mozzarella. Je n’ai jamais perdu mon enthousiasme d’enfant, j’ai toujours 20 ans dans ma tête même si le corps me rappelle que j’en ai trois fois plus.
FD : Pareil pour les réseaux sociaux. Je n’y comprends rien et je ne veux pas comprendre. Mais plus encore, je n’aime pas les écrans… J’aime faire des films mais je ne veux pas les voir. J’adore retourner en Belgique car personne ne me connaît.
LPN : Vos liens avec la Côte d’Azur ?
FD : Mes grands-parents avaient une maison à Saint-Raphaël. On avait un petit bateau, je connais tous les ports de la Côte d’Azur avec une préférence pour l’île du Levant. Pour L’ARNACOEUR, je ne suis guère sorti de l’hôtel, les magasins de luxe de Monaco ne m’ont pas trop intéressé, d’autant qu’il y avait une boîte de nuit dans l’hôtel.
VL : Là, on va finir la tournée. Nous avons 4 salles en une journée, Saint-Raphaël, Cagnes-sur-Mer, Antibes et Nice… Après, je viens de terminer le dernier film de Stéphane Brizé qui est en boîte, je vais enchaîner avec celui de Thierry de Peretti (Une vie violente) puis celui de Julia Ducourneau (Grave) et deux par Claire Denis avec Juliette Binoche.
FD : Moi, j’ai 4 à 5 projets en cours mais je préfère ne pas en parler par les temps qui courent. Je viens de faire 4 films d’affilée, je croyais être tranquille et puis il y a eu MON COUSIN auquel je vais me consacrer jusqu’à sa sortie le 30 septembre prochain. En fait, ça fait un an de demie que je ne fais que parler de moi…
Propos recueillis par Pascal Gaymard