Accueil À la Une SCIENCES – Psychothérapie Vittoz : Une thérapie ancienne face aux pratiques actuelles

SCIENCES – Psychothérapie Vittoz : Une thérapie ancienne face aux pratiques actuelles

Qu'est-ce qu'aujourd'hui une thérapeutique ? Quelle part revient à la pratique et à la relation ? Thérapie remontant aux années 1900, la Méthode Vittoz reste toujours d'actualité. Mais cette pratique ancienne se trouve maintenant confirmée par plusieurs courants de recherche actuelle. Explications.

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La Méthode Vittoz est un courant protégé par leurs deux écoles de formation de praticiens, l’IRDC (Institut de Recherche et de Développement du Contrôle cérébral) et l’ARV (Association Roger Vittoz). Les exercices pratiquées dans cette méthode mènent à la découverte, puis à l’intégration, de pans méconnus de soi-même. Le sensoriel prescrit, sert effectivement de voie de passage à « l’innommable ». L’être tout entier est touché, un possible s’ouvre, inattendu, et le lien corps-coeur-esprit s’en trouve revitalisé.

La base de la psychothérapie Vittoz

La théorie est fort simple. Le cerveau (l’organe) a deux fonctions, la fonction émissive et la fonction réceptive. Notre cerveau fonctionne ici comme un poste de radio émetteur-récepteur. La fonction réceptive permet de recevoir par les cinq sens tous ce qui est extérieur (sensorialités), et par la sensorialité du corps (la somesthésie) toutes nos sensations internes (postures, organes, etc). La fonction émissive nous fait produire des pensées, des gestes et des attitudes (tonicité). Le contrôle cérébral est la faculté de garder en équilibre ces deux fonctions. La pathologie découle de leur déséquilibre dont l’origine peut remonter à l’enfance ou à un traumatisme plus récent. La psychologie Vittoz va solliciter ces deux fonctions par des exercices corporels. Le docteur Roger Vittoz avait en effet observé sur lui-même, puis sur des patients, que la cause de leur épuisement venait d’une émissivité incontrôlée (vagabondage, idées obsessionnelles) et a constaté qu’il n’y avait qu’une seule façon d’arrêter de penser c’est de se mettre en état de présence au monde et à nous-mêmes, à savoir en réceptivités. Nous pouvons ainsi développer notre présence à l’autre, au monde, sans jugement ni a priori. Ne rejoignons-nous pas ici les pratiques actuelles de méditations agissant entre autres sur les fonctions cognitives ?

Le développent de la présence à la vie

Vittoz pensait qu’il fallait expliquer au patient pourquoi il était malade et comment il pouvait se guérir. L’ouvrage « Le traitement des psychonévroses par la rééducation du contrôle cérébral » (1911) traite abondamment de ce sujet. Ainsi, sur la base de deux parties (la partie fonctionnelle et psychique), le contrôle peut progressivement se rétablir et suffit le plus souvent à guérir le patient qui sait comment, par la pratique régulière des exercices, rester en équilibre. Les exercices rééduquent les fonctions cérébrales afin de susciter au patient une parole au plus proche du vécu, une importance est donné aux sentis, ressentis, par les souvenirs qui remontent. Ces exercices seront théorisés ensuite par Didier Anzieu, psychanalyste contemporain, apportant un nouvel éclairage dans son ouvrage « Le Moi-Peau »(1995) et les « Enveloppes psychiques » (2003). En revanche, et contrairement aux différentes approches psychanalytiques reconnues, le docteur Vittoz ne retiendra pas la notion de transfert et de contre-transfert, nécessaires au succès d’une analyse du patient. C’est l’exercice qui est considéré comme moyen d’interprétation, dans la prise de conscience du lâcher-prise au moment opportun, cet éclairage aura un effet percutant de prise de conscience. L’efficacité est liée au passage par le corps de l’effet de surprise. L’effet va s’inscrire dans la mémoire du corps. Dans cette méthode, et contrairement à la psychanalyse traditionnelle, le corps ne se dissocie pas du mental. Le corps est utilisé comme instrument de l’esprit.

Indications pour la rééducation des sens

A l’époque, le docteur Vittoz préconisait d’utiliser sa thérapie pour les psychasthéniques, ou syndrome psychopathologique chronique, se manifestant par l’incapacité à agir, l’absence d’attention, le manque d’appétit, l’insomnie, des préoccupations obsédantes, l’angoisse, le doute permanent. Actuellement, la méthode Vittoz s’est élargie aux personnalités états-limites, narcissiques, les syndromes post-traumatiques, les crises de la vie (deuil, licenciements…), les enfants et adultes ayant des difficultés de concentration, les dépressions et chez tous ceux qui sont intéressés par cet art de vivre au présent. Autant dire tout le monde peut être concerné tôt ou tard. Le Vittoz psychique actuel intègre une « thérapie à médiation corporelle » (Dr Annick Leca – Lien Corps Psychisme – Chronique sociale 2011), c’est-à-dire, qu’elle utilise le corps comme moyen d’accès et de mobilisation à la vie psychique. La sollicitation des sens va donner « sens » à leur dysfonctionnement et amener le patient à se poser des questions sur le « sens » de la vie, sur le « sens » de ce qu’il vit. On ne se laisse pas aller à un dialogue de type conversationnel qui n’ancre pas le sujet à son corps.

Pour terminer cette présentation, l’association Roger Vittoz propose quatre pôles à developper pour un traitement psychique : développer la capacité de demeurer dans la sensation car tout est sensation ; développer la capacité de nommer avec justesse ce que nous ressentons ; développer la capacité de demeurer dans la non-solution, la non-réponse dans l’impuissance et consentir jusqu’à ce que ça nous soit donné car toute vie est généreuse ; découvrir ou redécouvrir l’infini du recevoir… Une belle leçon de gratitude avec la libération nécessaire pour recevoir le don de la vie.

Véronique La Rosa

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