Et c’est bien un drame shakespearien qui se joue sous nos yeux de « gaulois réfractaires »… Lors de son discours à l’Assemblée Nationale devant les députés, Édouard Philippe s’est voulu rassurant et plus il rassure, plus il nous inquiète… Un mot revient comme un leitmotiv « progressif ». Exit ceux qui croyaient que la vie reprenait son cours le 11 mai prochain. Et encore, « si certains indicateurs en nombre de nouveaux malades le permettent » … C’est un déconfinement mais « des plus stricts ». Il faut dire que depuis la crise du coronavirus, nous ne sommes pas à une contradiction ou une approximation près. Ce déconfinement sera en fonction du nombre de malades par département avec des catégories rouges (virus circulant de manière élevée) ou verte (virus moins présent). Cette période transitoire doit se poursuivre jusqu’au 2 juin…
En attendant, les tests virologiques deviennent exponentiels, de 500 000 annoncés il y a quelques jours par le même Édouard Philippe, on passe à 700 000 par semaine. Il faut « briser les chaînes de contamination » dit-il et dans ce sens, « tous les cas contacts seront testés et invités à s’isoler, compte tenu des incertitudes sur la durée d’incubation ». Donc, si vous avez le virus, soit vous restez chez vous durant 14 jours, soit vous êtes fortement invité aux frais de l’État à aller dans un hôtel réquisitionné à cet effet. Ces tests pourront enfin être effectués par des laboratoires et les labos vétérinaires, on a perdu 2 mois !
Pour les écoles, collèges et lycées…
Mais le foutage de gueule se poursuit : « Il y aura assez de masques dans le pays pour faire face aux besoins à partir du 11 mai » selon Édouard Philippe, soit 2 mois après le début du confinement ! Les pharmacies ont reçu le droit de vendre des masques, il y a seulement trois jours ! Si le masque qui ne servait à rien, dixit le même Édouard Philippe, Olivier Veran et Si-beth N’Diaye, il y a deux mois, il sera désormais obligatoire dans les transports publics et dans toute situation où les distances « barrières » ne pourront pas être appliquées… Dans les écoles et collèges, « tous les enseignants et encadrants recevront des masques », alléluia ! Le masque sera interdit pour les enfants de classes maternelles mais sera obligatoire pour les collégiens. Idem dans les commerces où « le port du masque sera recommandé pour les personnels et les clients quand les règles de distanciation physique ne peuvent être appliquées ». Un commerçant pourra conditionner l’accès à son magasin au port du masque. Et dire qu’ils ne servaient à rien quand nous n’en avions pas, il y a deux mois, faute à un pouvoir irresponsable. Crèches, écoles, collèges vont rouvrir mais par groupes de 10 à la crèche et 15 à l’école et dans les collèges qui eux, seront opérationnels au 18 mai… Progressif vous a-t-on dit. Pour les lycées, ce ne sera pas avant le 2 juin… Comprenne qui pourra. Les plus âgés plus tard, alors qu’ils sont normalement les plus raisonnables. Mais pour chacun, il s’agira de s’appuyer sur le volontariat…sachant que le conseil scientifique a émis un avis défavorable… La cacophonie continue à moins que cela soit une stratégie d’excuse pour plus tard ?
La culture et le sport sinistrés…
En attendant, « le télétravail doit rester la norme ». Dans les commerces, le flux des clients devra être contrôlé pour les surfaces de moins de 40 000m2, comme dans les transports, la règle sera un siège sur deux. Personne ne pourra aller à plus de 100 km de chez soi à moins de justifier de « motifs professionnels ou familiaux impérieux ». Plus généralement, « les rassemblements publics ou dans les lieux privés seront limités à dix personnes ». Pour les sportifs en herbe, la pratique sportive « en plein air en respectant les règles de distanciation physique » est autorisée. Mais les sports collectifs ou de contact sont exclus, soit la fin de toute compétition sportive jusqu’à l’été… tout comme les plages qui restent fermées au moins jusqu’au 1er juin. Tout devrait être revu fin mai pour les cafés, restaurants et établissements culturels (Grands musées, salles de concert, de fêtes, théâtres et cinémas…). En revanche, « les médiathèques, bibliothèques et petits musées pourront rouvrir leurs portes dès le 11 mai ». En conclusion, on déconfine mais lentement, progressivement et avec des mesures barrières. Il aurait été tellement plus simple de déconfiner tout le monde en même temps avec des formations d’hygiène pour empêcher la propagation du virus et les outils nécessaires, gants, masques, gel, distances… Le 11 mai aurait pu être une journée de formation sur ces pratiques partout en France, y compris avec une formation en ligne mise en place par le gouvernement. Cela aurait le mérite de la clarté car le 11 mai, pour beaucoup de Français n’en déplaise à Édouard Philippe, ils s’estimeront déconfinés et le reconfinement ne sera plus possible…
Pascal Gaymard