Accueil À la Une HOMMAGE : Philippe Nahon, « une légende » …

HOMMAGE : Philippe Nahon, « une légende » …

Décidément, les décès des gens que l’on aime se poursuivent car après Christophe, voici Philippe Nahon, 81 ans, qui nous a quittés victime d’une longue maladie aggravée par une infection au Covid-19.

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L’acteur Fétiche de Gaspar Noé
Qui se souvient qu’il a débuté chez le maître, Jean-Pierre Melville qui l’a fait tourner dans « Le Doulos » (1962), il sera Rémi. Âgé de 81 ans, Philippe Nahon était un habitué des seconds rôles (« Le pull-over rouge » (1979), « Clara et les chics types » (1981), …) mais sa gueule était connue et aimée de tous les cinéphiles. Cinéma, mais aussi théâtre, télévision où il avait joué dans tant de séries populaires telles que Les cinq dernières minutes, Maigret (1984-1987), Navarro, Kaamelott (2004), Mafiosa (2011), Alice Nevers, le juge est une femme (2016). Mais c’est avec Gaspar Noé qu’il va littéralement crever l’écran avec « Carne », présenté au Festival de Cannes en 1991. Il joue le rôle d’un boucher vengeur qui fera sensation sur la Croisette. Il entre direct dans les très proches de la tribu de Gaspard, il sera son homme lige, son Fétiche. Les réalisateurs atypiques de même génération feront appel à lui comme Mathieu Kassovitz dans « La Haine » pour le chef de la police, ou Jacques Audiard dans « Un héros très discret » où il joue le Général, voire avec Vincent Ravalec pour « Cantique de la racaille ». Philippe Nahon était une figure, l’un de ses acteurs dont on se souvient, qui effrayait aussi… Gaspar Noé disait de lui à propos de « Carne » : « Nous avons eu un coup de foudre mutuel pour faire ce film et après il me tenait à cœur de continuer avec lui ». Il a tenu parole puisqu’il y a eu ensuite « Seul contre tous » (1998), encore le boucher… Puis, « Enter the Void » (2000), « Irréversible » (2002), et enfin, « Irréversible – Inversion intégrale » en 2019, lorsque Gaspar a remonté le film chronologiquement…

Un hommage unanime de la nouvelle génération de cinéastes
Les hommages se sont succédé parmi cette nouvelle vague de réalisateurs. Ainsi, Mathieu Kassovitz a évoqué « un comédien des amoureux du cinéma et un acteur hors pair », Albert Dupontel, « un acteur rare, d’une sensibilité et d’une sincérité hors du commun… parti dans l’infini, sa vraie dimension », Fabrice Du Welz qui l’avait dirigé dans « Calvaire » (2004), « Il est devenu l’acteur d’une génération et je suis heureux d’avoir croisé sa route », Alexandre Astier pour Kaamelott, « Bon sang que c’est triste », ... Cela prouve toute l’importance de Philippe Nahon dans le cinéma français, certains parlant même de « légende » à son sujet. Pour compléter sa filmographie, citons pêle-mêle, « Les Anges gardiens » (en 1995), « Les Couloirs du temps, les visiteurs 2 » (en 1997), « Les Rivières Pourpres » (2000), l’excellent film de Christophe Gans, « Le Pacte des Loups » (2001). Tous ceux qui l’ont dirigé ont eu les mêmes mots pour le qualifier, « un homme attachant, touchant et sensible, et un grand professionnel ». Plus près de nous, il avait été en 2010, dans « Mammuth » de Gustave Kervern et Benoît Delépine, ou dans « Adèle Blanc-Sec » de Luc Besson. Mais c’est aussi le ministre d’ « Une Histoire d’Amour » (2013), le Préfet dans « Colt 45 » (2014), le chercheur d’or de « Cino, l’enfant qui traversa la montagne » (2014), ou encore le photographe dans « Moi et le Che » (2016). Sa dernière apparition au cinéma avait été dans « Maman est morte » de Christophe Le Masne, en 2017. Laissons le mot de la fin à Gaspar Noé : « Tout en étant extrêmement droit, il pouvait jouer des rôles tordus et compliqués et les rendre attachants… Travailler avec lui c’était comme partir en vacances avec un ami ». Alors salut l’ami et nul doute que là-haut, il y a aussi une place pour les bouchers !

Pascal Gaymard